La pénurie d'enseignant.e.s dans les écoles primaires d'Auderghem
La FAPEO tirait la sonnette d’alarme la semaine dernière avec la sortie des résultats de son enquête « PASDEPROFSPASDECOURS ! ». Les chiffres issus de cette enquête sont interpelant. Ainsi, dans l’enseignement primaire, les répondant.e.s, pour un quart, affirment que leur enfant n’a pas eu d’enseignants pendant plus de 15 jours. Pour le niveau maternel, le nombre de répondant.e.s est faible mais pointent tout de même des difficultés.
La pénurie d’instituteur.trice.s et de professeur.e.s est bien connue. Toutefois, la FAPEO affirme que l’absence de cours n’est pas uniquement due à la pénurie et que l’absentéisme des enseignant.e.s serait pour partie responsable des horaires en dent de scie des élèves.
La FAPEO se fait le porte-voix des parents, qui aimeraient des réponses concrètes relatives à la scolarité « à trous » de leurs enfants et appellent à la continuité du service public. Comment un.e élève qui a été privé.e de cours pendant une longue période a-t-il.elle pu atteindre les compétences fixées par le législateur pour réussir ses examens de fin d’année ? Quelles répercussions ces suspensions auront-elles à long terme sur les savoirs de l’enfant?
La FAPEO souligne également l’injustice sociale qui se joue face à ce temps scolaire perdu. Les parents doivent alors suppléer aux lacunes pédagogiques, soit en faisant la classe eux-mêmes – alors qu’ils ne sont généralement ni professeur.e.s, ni pédagogues, soit en payant des professeur.e.s particulier.e.s. L’une et l’autre solutions ne sont pas à la portée de tous et renvoient les enfants aux ressources socio-économiques de leurs parents, creusant le fossé des inégalités que l’école devrait combler.
Un point important également souligné par l’enquête est la nécessité d’une amélioration de la communication de ces absences aux parents.
Enfin, outre les inquiétudes légitimes des parents quant aux répercussions sur les apprentissages de leurs enfants, cette enquête pose également la question des conditions de travail des enseignant.e.s, notamment lorsque les classes se voient alourdies par la venue des élèves dont l’enseignant.e est absent.
- La situation dans les écoles communales est-elle objectivée, quant à la pénurie et quant à l’absentéisme?
- Des mécanismes sont-ils mis en place pour parer à la pénurie ?
- Des mécanismes sont-ils mis en place pour lutter contre l’absentéisme ?
- Quelles solutions sont développées pour assurer le suivi scolaire des enfants en l’absence de leur enseignant.e ?
- De quels soutiens éventuels Auderghem bénéficie-t-elle de la part de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour répondre à ces problématiques ?
Madame la conseillère communale,
Je vous remercie pour votre question.
La pénurie d’enseignants fait l’objet d’une attention particulière des pouvoirs publics, et bien évidemment de la part de notre Pouvoir organisateur aussi.
Je partage les constats cités dans votre introduction et présentés par l’étude réalisée par la FAPEO. De manière générale, le phénomène de pénurie se fait ressentir de manière plus criante dans l’enseignement secondaire que dans le fondamental.
Il n’empêche qu’aucun Pouvoir organisateur n’est tout à fait épargné. En effet, certaines écoles se retrouvent dans une situation dans laquelle elles sont obligées d’engager des personnes qui n’ont pas le titre requis et dont elles savent qu’elles n’ont pas nécessairement le profil pour le poste. Leur préoccupation première étant de ne pas laisser les élèves sans enseignant.e.s.
Concentrons-nous maintenant sur Auderghem.
Tout d’abord, concernant l’absentéisme et la pénurie, il n’existe pas à proprement parler d’outil statistique de suivi de ces deux phénomènes.
Au jour d’aujourd’hui, il existe des relevés d’absence pour maladie sont envoyés mensuellement au service de l’Enseignement d’Auderghem qui ensuite nous permette de rendre des comptes à la Fédération Wallonie Bruxelles. Même s’il pourrait être envisageable de mettre en place ce type d’outil en Fédération, cela ne pourra pas résoudra pas la cause de l’absentéisme, ni même de la pénurie.
Pour ce qui est de la pénurie, il n’existe pas non plus d’outil d’objectivation du moins si l’on entend le terme d’objectivation dans le sens d’un outil statistique qui permette de tenir la mesure pleine de la pénurie actuelle. Par contre, nous avons évidemment une vue d’ensemble sur la situation des présences des enseignants de nos 4 centres scolaires et je peux vous assurer que nous mettons en place un monitoring hebdomadaire qui permette de suivre la situation de près.
Parallèlement à cela, les directions d’écoles, le conseiller pédagogique et le Service Enseignement sont attentifs en permanence aux besoins des écoles et veillent dans ce cadre à ce que le personnel réponde aux attentes des normes d’excellence fixées par la Commune. Soulignons ici que notre Pouvoir Organisateur est le seul à proposer autant d’enseignants à charge communale pour éviter des classes surpeuplées et maintenir des projets pédagogiques ambitieux.
Notons aussi que nous avons jusqu’ici réussi à ne presque jamais souffrir de la pénurie sévère qui sévit dans le monde de l’enseignement. Cette année académique relève d’une exception en la matière et est, selon nous, la résultante de deux facteurs qui ont déstabilisé le marché de l’emploi, à savoir un subventionnement plus important des sections maternelles et le subventionnement tout récent de périodes de FLA. Ce dispositif permet aux écoles d’obtenir des périodes de cours supplémentaire pour les écoles, dont les élèves qui ne maîtrisent pas la langue de l’enseignement.
Si les financements “FLA” ont une grande utilité dans l’un des domaines où nos écoles ont le plus de difficultés, ils entraînent aussi des effets pervers. En effet, puisqu’ils permettent à certaines écoles d’augmenter leurs nombres de périodes, ils entraînent une concurrence extrême entre pouvoirs organisateurs et entre écoles. Cette situation accroît encore plus la problématique lancinante de la pénurie des enseignant.e.s.
Vous me posez ensuite la question sur les mécanismes mis en place pour parer à cette pénurie.
Depuis un peu moins de dix ans maintenant, la commune, en tant que PO, s’adjoint les services supplémentaires (à charge communale donc) d’institutrices dites « volantes ». Nous recrutons ainsi en début d’année deux équivalents temps plein (l’un en maternelle, l’autre en primaire), afin de pallier aux absences de nos titulaires de classe et de permettre de procéder à des recrutements pérennes qui ne cèdent en rien à l’urgence.
Un soutien des jeunes enseignants est également organisé au niveau communal via notre conseiller pédagogique et les directions d’école pour fidéliser nos jeunes recrues et leur permettre une entrée en fonction dans les meilleures conditions.
Pour ce qui est de mécanismes que nous mettons en œuvre pour prévenir l’absentéisme, je peux vous citer plusieurs exemples comme la mise à disposition de la cellule médiation pour rencontrer les difficultés que les enseignants éprouvent au travail ou encore le coaching des directions d’école planifiée en 2020 pour renforcer leurs outils managériaux et capacité à accompagner leur équipe enseignante dans les mutations vécues par les écoles (plan de pilotage, contrats d’objectifs et mise en œuvre du travail collaboratif). Nous mettons aussi à disposition des enseignant.es qui le souhaitent un registre des faits liés au bien-être et censés parer à tout type de pratique s’apparentant à du harcèlement ou une forme d’abus psychologique. Enfin, nos directions ont aussi suivi une formation sur la gestion de l’absentéisme l’année dernière.
De manière générale, le service de l’Enseignement est très attentif au travail de terrain et toujours à l’écoute et disponible en cas de difficultés vécues par un membre d’une équipe pédagogique (enseignant, direction, accueillante, personnel d’entretien..)
Pour répondre à votre question sur les solutions développées pour assurer le suivi scolaire des enfants en l’absence de leur enseignant.e, comme évoqué plus haut, nous avons de nombreux enseignants à charge communale dont, en l’occurrence, deux instituteur.trices volant.e.s.
Lorsque, malgré tout, il nous est impossible de placer un enseignant à la tête de la classe concernée, plusieurs possibilités s’offrent à nous :
- S’il s’agit d’un maître spécial (gymnastique, religion, citoyenneté), nous pouvons très majoritairement compter sur la conscience professionnelle de nos équipes pédagogiques pour garder de manière bénévole les enfants.
- S’il s’agit d’un titulaire de classe, nous privilégions lorsque c’est possible une surveillance dirigée en classe qui est opérée soit par les secrétaires (qui sont aussi enseignantes), soit par les maîtres de remédiation, soit par des surveillantes de garderie. Le recours à une ALE « volante » pour ce genre de cas est également actuellement à l’étude par le Service Enseignement.
- S’il s’agit d’un titulaire de classe et qu’aucune mesure évoquée ci-avant n’est envisageable, nous répartissons les élèves dans différentes classes.
Il faut noter que chaque titulaire de classe a pour obligation de mettre à disposition, en début d’année, un dossier d’occupation qui fasse sens pour les élèves. Celui-ci propose des exercices et des tâches que les enfants peuvent réaliser en toute autonomie, ce quel que soit leur niveau et leurs besoins.
Enfin, concernant votre question sur le soutien éventuel de la FWB, il n’y en a malheureusement que trop peu. Nous pouvons néanmoins compter sur l’application appelée Primoweb qui est censée nous permettre d’avoir accès aisément aux enseignants demandeurs d’emploi, mais, dans la pratique, cette plate-forme ne s’avère pas du tout utile.
Pour conclure, j’aimerai vous assurer du suivi et du monitoring régulier de nos directions et de notre conseiller pédagogique qui assure une gestion durable des remplacements nécessaire avec pour objectifs les apprentissages et le bien-être des enfants.